Le moins qu’on puisse dire, c’est que le patrimoine culturel immatériel (PCI) est un élément essentiel à la santé des collectivités et au développement durable.
Mais de quoi donc s’agit-il?
Pour comprendre ce concept, le plus simple est de rappeler la signification de chacun de ses termes.
Patrimoine désigne ce qui se transmet de génération en génération; culturel renvoie aux traditions et aux identités qui nous rassemblent; et immatériel qualifie ce qu’on ne peut toucher.
Ensemble, ces mots englobent donc les traditions et expressions vivantes qui sont transmises de génération en génération. Le patrimoine culturel immatériel est en quelque sorte un « patrimoine vivant » qui comprend, entre autres, rassemblements communautaires, traditions orales, chansons, connaissances du milieu naturel, méthodes de guérison ancestrales, aliments, fêtes, croyances, savoir-faire artisanal, techniques culinaires, vinicoles, agricoles et relatives à l’élevage du bétail, et navigation traditionnelle. Les éléments de ce type de patrimoine font partie intégrante de la vie, tant dans les villes que dans les milieux ruraux, ainsi que pour les peuples autochtones.
Le patrimoine culturel immatériel est « traditionnel, contemporain et vivant à la fois », tout en étant inclusif, représentatif et fondé sur les communautés.
Pourquoi le patrimoine culturel immatériel est-il important?
Parce qu’il contribue à :
- promouvoir la tolérance, la paix et de la réconciliation;
- favoriser le bien-être des collectivités et des personnes;
- promouvoir les droits de la personne et le développement durable.
Mais le patrimoine culturel immatériel est en perpétuel risque de disparition, risque largement attribuable à la mondialisation.
Pour y remédier, l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) a élaboré la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel en 2003. À ce jour, cette Convention compte 178 pays signataires qui ont inscrit près de 500 éléments aux listes du Patrimoine culturel immatériel et au registre des bonnes pratiques de sauvegarde. En 2018, ces listes comprennent des éléments comme les rites de passage masculins de la communauté masaï du Kenya, les savoirs et savoir-faire des aiguadiers d’Algérie et l’art des marionnettes à gaine traditionnelles d’Égypte.
Mais la Convention de 2003 ne s’en tient pas qu’à ces listes et aux inventaires. Pour préserver la vigueur des différents éléments du patrimoine culturel immatériel, encore faut-il qu’ils résonnent dans les collectivités et qu’il se transmette de génération en génération.
Il est important de souligner que le patrimoine culturel immatériel est fondé sur ces collectivités. Il est donc reconnu par elles ainsi que par les groupes et les personnes qui l’enrichissent, l’alimentent et le transmettent.
Les efforts de promotion et de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel sont pris en charge par les porteurs de traditions eux-mêmes. Au Canada, les localités, les organisations non gouvernementales et les administrations provinciales ont aussi leur rôle à jouer dans la création des politiques en faveur de la sauvegarde du patrimoine vivant.
Bien que le Canada n’ait pas ratifié la Convention de 2003, les praticiens et décideurs de tous les ordres peuvent se baser sur ses principes et mécanismes ou s’en inspirer.
Types de patrimoine culturel immatériel
Pour aider les gens à comprendre le patrimoine culturel immatériel, l’UNESCO, dans sa Convention, le divise en cinq grands domaines :
- Traditions et expressions orales. Il peut s’agir entre autres de proverbes, d’énigmes, de contes, de légendes, de mythes, de chansons de geste, de poèmes, de charmes et de chansons.
- Arts du spectacle. On peut parler de musique, de danse, de théâtre, de pantomime, de chansons et d’autres formes d’expression artistique qui sont transmises de génération en génération.
- Pratiques sociales, rituels et événements festifs. Il s’agit d’activités qui rythment la vie des collectivités et auxquelles leurs membres s’adonnent ensemble : rites d’initiation, cérémonies funéraires, carnavals saisonniers, fêtes des récoltes, etc.
- Connaissances et pratiques concernant la nature et l’univers. Il s’agit des connaissances et des aptitudes que les communautés ont développées au contact de leur milieu naturel. Elles peuvent se manifester dans le langage, dans les souvenirs, dans la spiritualité et dans la vision du monde. Parmi les éléments de ce domaine, notons l’architecture, l’agriculture, l’élevage de bétail et les traditions culinaires.
- Savoir-faire lié à l’artisanat traditionnel. Ce domaine peut sembler plutôt « matériel », mais il renvoie aux aptitudes et aux connaissances à l’œuvre dans l’acte de production artisanale et non aux produits eux-mêmes : poterie, ébénisterie, joaillerie et travail lié aux pierres précieuses, broderie, tissage de tapis, fabrication d’instruments de musique, tissage et fabrication de tissus.
Cette liste n’est pas exhaustive ou exclusive. Les pays peuvent aussi s’en remettre à d’autres systèmes pour cerner et classifier les éléments du patrimoine culturel immatériel présents sur leur territoire.
Sauvegarder ou préserver?
Dans le domaine du PCI, le terme « sauvegarde » est utilisé pour caractériser les efforts visant à protéger des éléments du PCI, sans chercher à les figer sous une forme pure ou authentique.
La clé de la sauvegarde est la transmission : veiller à ce que le patrimoine culturel immatériel soit transmis de génération en génération, de manière à laisser une place à l’évolution naturelle du savoir et du savoir-faire.
Patrimoine culturel immatériel de l’humanité ou patrimoine mondial?
Beaucoup confondent le patrimoine culturel immatériel de l’humanité avec la liste du patrimoine mondial, mais il s’agit de deux choses distinctes.
La liste du patrimoine mondial comprend les sites patrimoniaux naturels et culturels d’une valeur universelle exceptionnelle selon le cadre défini par la Convention du patrimoine mondial (1972).
Colonisation et patrimoine culturel immatériel au Canada
Selon la Commission de vérité et réconciliation, des politiques d’assimilation s’en prennent depuis plus d’un siècle au patrimoine culturel immatériel et aux langues des peuples autochtones. Mais malgré ces préjudices, les peuples autochtones n’ont jamais cessé de faire des efforts pour maintenir, transmettre et faire vivre leur patrimoine dans le monde contemporain.
Tous les Canadiens devraient réfléchir aux différentes façons de soutenir ces efforts, tout en reconnaissant et en respectant le droit des peuples autochtones d’observer et de dynamiser leurs coutumes et traditions culturelles. En effet, la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA) leur reconnaît ce droit, qui comprend la préservation, la protection et le développement des manifestations passées, actuelles et à venir de leur culture, comme les sites archéologiques et historiques, les artefacts, les motifs, les cérémonies, les technologies, la littérature, les arts visuels et les arts du spectacle.
En tant que source de bien-être communautaire et de compréhension mutuelle, le patrimoine culturel immatériel peut faciliter la réconciliation des peuples autochtones et non autochtones du Canada.
Qu’arrive-t-il quand on se soucie du patrimoine culturel immatériel?
- Le patrimoine de l’humanité s’en trouve enrichi et diversifié.
- Les minorités et les petites communautés sont plus saines et résilientes.
- On soutient des activités au potentiel économique pour les artisans et les communautés.
- On se comprend mieux d’une communauté à l’autre.
- On se sent lié aux éléments du milieu naturel et de l’histoire de la communauté qui aident à comprendre qui on est.
Comment sauvegarder le patrimoine culturel immatériel?
Pour sauvegarder le patrimoine culturel immatériel, la première étape est la sensibilisation : aider les gens à comprendre ce patrimoine et pourquoi il est important. Parmi les autres techniques de sauvegarde, notons les suivantes :
- Inventaire communautaire. Les membres des collectivités peuvent dresser l’inventaire des éléments du patrimoine immatériel et fournir des renseignements sur leur statut. Un inventaire peut servir de base pour les efforts de sauvegarde par les membres d’une communauté.
- Réseautage. Le fait de conjuguer ses efforts à ceux d’organismes qui œuvrent déjà dans le domaine du patrimoine culturel immatériel peut accélérer l’atteinte des objectifs.
- La recherche sur le patrimoine culturel immatériel comprend, entre autres, la cartographie des pratiques exemplaires; l’évaluation des politiques; les études de faisabilité concernant l’inclusion de programmes sur le patrimoine culturel immatériel dans les écoles, les organismes publics et les établissements communautaires; et l’évaluation des capacités en matière de patrimoine culturel immatériel en vue de garantir son développement durable et de promouvoir la paix et les rapprochements.
- Pour les pays qui ont ratifié la Convention de 2003, l’inscription d’éléments de patrimoine culturel immatériel sur les listes et registres internationaux représente la méthode privilégiée par l’UNESCO pour promouvoir l’importance de ce patrimoine et pour donner de la visibilité à la Convention. Au fil de ses rencontres annuelles, le Comité intergouvernemental de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel a été en mesure d’inscrire plus de 500 éléments sur ces listes et registres.
Votre curiosité a été piquée? Jetez un coup d’œil aux ressources qui suivent :
The ICH Blog (en anglais seulement)
Heritage Saskatchewan (en anglais seulement)
Conseil québécois du patrimoine vivant
Guide pour les municipalités (rédigé par le Conseil québécois du patrimoine vivant et le Ministère de la Culture et des Communications du Québec)